vendredi 12 juillet 2013

La tentation du gaz de schiste

Carte des titres miniers d'hydrocarbures au 1er juillet 2012


Quelques jours après le limogeage de Delphine Batho, Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif revient à la charge sur l'exploitation des gaz de schiste. Je ne reviendrais pas sur les aspects polémiques fort bien exposé sur A perdre la Raison en réponse au billet de Juan.

Même s'il existe actuellement un consensus mou autour du principe de non-exploitation en France des gaz de schiste, il n'en demeure pas moins qu'il y a une forte tentation de parvenir à court ou moyen terme à une levée partielle ou totale de ce moratoire.
Les industriels de la prospection ne l'entendent pas autrement et d'ailleurs, ils sont déjà sur la ligne de départ comme en témoigne les permis d'exploitation visibles sur les cartes géologiques du Ministère de l'Écologie, du Développement Durable et de l'Énergie. On peut compter sur eux et leur puissance de lobbying pour pousser dans ce sens.

La tentation politique reste grande d'autoriser ce type d'exploitation afin de retrouver comme aux États-Unis de la croissance, voire de booster une croissance désormais structurellement faible dans les pays occidentaux.
Si l'opinion est actuellement majoritairement opposée à l'exploitation des gaz et huiles de schiste,  ce type d'exploitation risque de revenir bien plus vite que prévu.
Par exemple, elle peut revenir à la marge au travers de permis d'expérimentation de techniques supposées non polluantes.
C'est ce genre de manipulation qui avait été tenté pour l'introduction des techniques OGM en France. Le mot "expérimentation" est désormais le sésame pour introduire des mesures ou des techniques contreversées, sachant que la fameuse expérimentation ne sera jamais évanuées et ne fera jamais l'objet d'un débat contradictoire.
Et il y aura toujours des comités scientifiques pour attester qu'une technique utilisée est non polluante voire éco-compatible. 
Comme je le disais sur un commentaire posté chez Juan : 

"Officiellement, l’exploitation des gaz de schiste par fragmentation hydraulique est sûre et non polluante aux États-Unis. Parole d’experts et de scientifiques…"

Dans l'immédiat, je vous recommande de regarder Gasland actuellement visible sur Arte+7.


vendredi 5 juillet 2013

Drame de l'assistanat

" Ce qui mine la société française, ce n'est pas l'élitisme, c'est l'égalitarisme, le nivellement, l'assistanat... "
Nicolas Sarkozy (Entretien à Paris-Match, 23 mars 2006)


Page Facebook de Nicolas Sarkozy

jeudi 4 juillet 2013

L'après Villeneuve-sur-Lot

Les résultats des premiers tours sur la 3e Circonscription du Lot en 2012 et en 2013


Cette élection a été bien sûr largement commentée dans la presse mais aussi sur les blogs, en particulier sur les Left-Blogs.

J'ai lu beaucoup d'articles et de commentaires. Il y a parfois des avis très tranchés, des positions bâties sur des principes inamovibles, d'autres plus pragmatiques.

Un débat fertile qui n'est pas sans m'inspirer quelques réflexions à loi, contemplateur de la vie politique et aussi par un travail militant, (modeste) acteur de cette vie politique.



A chaud, cette élection est un double-choc pour la Gauche. Un premier choc suite à l'affaire Cahuzac qui a ouvertement menti à ses amis politiques et à l'ensemble de l'Assemblée Nationale. Et un deuxième choc avec l'élimination à l'issue du premier tour du candidat socialiste au profit du Front National en pleines terres roses.



Gauche sanctionnée

Le Parti Socialiste a été clairement sanctionné et c'est normal. Jérôme Cahuzac par ses mensonges répétés puis par sa confession a très largement discrédité une formation qui avait fait de l'assainissement de la vie politique un objectif majeur.

C'est une sanction très dure pour de nombreux socialistes qui se sont ouvertement engagés dans cette voie, luttant pour faire évoluer les choses en interne ce qui est loin d'être facile. Parité, non-cumul des mandats, lutte contre les conflits d'intérêts, publication de l'utilisation des cagnottes parlementaires, transparence... les choses progressent pourtant, sans doute pas assez vite mais elles vont dans le bon sens. Bien plus que dans d'autres partis qui persistent à approuver des pratiques que désormais, une grande majorité des Français réprouvent.



La Gauche désunie, Front en embuscade

Le Front National a bouleversé la donne électorale. Son électorat traditionnellement situé à la droite de la droite, s'est depuis bien longtemps élargi, avec un large écho dans les classes populaires qui ont depuis très longtemps abandonné les partis dit ouvriers. Le FN est aussi celui des désabusés d'une démocratie qui estiment-ils les a depuis longtemps abandonnés. Et aussi, c'est le recours du vote sanction, avec des électeurs qui prennent le temps de voter pour lancer un signal aux partis traditionnels. Cette lente progression n'a été possible qu'avec la mutation de notre société tant d'un point de vu économique que sociologique. Le FN excelle électoralement dans les zones économiques faibles ou isolées, dans les territoires où se manifestent de profonds déséquilibres.

La présence du Front National et son poids électoral met fin au système des deux camps, Gauche et droite, dont les composantes jouaient en solo au premier tour puis rassemblaient leurs forces respectives au second tour.
Ce schéma est désormais fini et les composantes de la Gauche (PS, PC, PG, PRG, EELV) doivent désormais y réfléchir. Soit elles persistent à jouer en solo au premier tour avec le risque grandissant d'élimination à l'issue de ce premier scrutin, soit elles réfléchissent à des accords locaux ou nationaux permettant de se rassembler sur des candidats uniques.
Un tel accord aurait permis de sauver la 3e circonscription du Lot-et-Garonne et la sauver d'un arbitrage hasardeux entre droite et Extrême-Droite (voir chiffres ci-dessus).



Le Front Républicain
Il ne faut hésiter à le dire : le Front Républicain est une invention de partis de gauche qui ne sert qu'à favoriser la Droite classique confrontée à l'Extrême-Droite. D'ailleurs, on remarquera que la réciproque n'est souvent pas systématique, la Droite classique refusant d'appeler au Front Républicain et préférant laisser le choix aux électeurs.
Et en cela, je comprend ceux qui ont choisi de ne pas se prononcer entre deux candidats de droite au second tour, entre des candidats d'une Extrême-Droite dont on connaît les valeurs et une Droite classique qui lorgnent de plus en plus sur les bonnes recettes frontistes.
On se rappelle aussi de ce qu'a fait Jacques Chirac de ses 82,21 % du second tour de 2002 : les électeurs de gauche ont finalement avec les gouvernements Raffarin et le trublion Nicolas Sarkozy chèrement payé leur ralliement à Jacques Chirac. 
D'un autre côté, il faut assumer le fait de laisser le loup dans la bergerie, c'est à dire avoir des élus frontistes avec toutes les conséquences de cette absence de choix. C'est un choix qu'ont fait 5.624 électeurs de la 3e circonscription du Lot-et-Garonne (15 % des votants) au second tour.
Le Front Républicain peut être proclamé par les états-majors mais finalement, cela reste une décision personnelle de l'électeur.
 

Une élection, aussi un phénomène local

Excepté pour les élections présidentielles et pour les Européennes, le sort des élections se fait souvent localement, pour les élections des élus des collectivités locales mais aussi pour les élections législatives qui constituent un scrutin de circonscriptions. Outre les aspects de politique nationale, ces élections revêtent un aspect local avec des électeurs qui doivent se prononcer sur des candidats qu'ils connaissent et côtoient régulièrement. Cela explique même certaines aberrations avec des électeurs qui votent pour un candidat de droite pour une élection et pour un candidat de gauche à une autre élection tout en estimant leurs choix cohérents.
Là encore, l'appréciation du candidat est aussi une question de convictions personnelles et d'adhésion ou de non-adhésion aux candidats, qui échappent aux calculs des états-majors parisiens et des pronostiqueurs professionnels et même aux fines analyses de Julien Dray.

Villeneuve-sur-Lot est un choc mais cette élection reste un indicateur. Le véritable choc serait l'échec total du mandat de François Hollande : si après Sarkozy, Hollande échoue, il ne restera plus que le Front National.
La Gauche, les Gauches n'ont pas le droit à l'échec.

samedi 29 juin 2013

Mélenchon voyage sur Air Grande Gueule

C'est un post un peu facile sur lequel il est facile de faire du flux et pour lequel je vais sans doute me faire taper les doigts.

Mais vraiment, Jean-Luc Mélenchon est un bon client. Et quand il déclare au salon de l'aéronautique du Bourget :
"Moi, quand je voyage, je voyage en classe affaires. J'ai passé l'âge d'aller me faire briser le dos à la classe économique."
...cela me fout hors de moi ! Merde quoi ! A quoi joue-t-il ? Alors que le vote Front National progresse à vitesse galopante au sein des classes populaires, vivier historique des partis ouvriers et que la tactique ouverte de clivage du Front de Gauche n'a aucun résultat (voir les résultats des dernières élections), voilà notre chevalier blanc de la Gauche qui en remet une couche.
Il est dans son droit de préférer la classe affaire à la classe économique, pour une question de confort ou tout simplement pour pouvoir travailler pendant ses déplacements.
Mais de là à le déclarer et le revendiquer publiquement, il y a un pas que n'hésite pas à franchir Mélenchon, histoire de faire une petite phrase qui va faire le buzz.
Cependant, quand on est chef d'un parti ouvrier censé relayer les revendications et les difficultés des français les plus touchés par la crise et les mutations économiques et sociales, on évite ce genre de saillies intempestives qui accréditent le crédo frontiste du "tous pourris".

A moins que la grande tactique sous-jacente soit de pousser encore plus d'électeurs vers les filets nauséeux  frontistes... Jean-Luc Mélenchon et tous les leaders de la gauche ont des responsabilités car désormais, ils sont aussi bien jugés sur leurs actions que sur leurs comportements, ce qu'on appelle la gouvernance.




Illustration : l'excellent Tropical Boy



lundi 24 juin 2013

L'affaire Tapie s'emballe : Nanard convoqué par la Justice

 
Inconnu manquant au casting


Jean Peyrelevade, ex-président du Crédit lyonnais, de 1993 à 2003 s'est confié aux Échos et estime qu'à propos de l'affaire de l'arbitrage controversé rendu en faveur de Bernard Tapie, que désormais rien ne pourra arrêter la justice.

Il donne d'ailleurs son sentiment sur cette affaire et sur l'omerta qui l'entourait :

"En tant que président du Crédit lyonnais de 1993 à 2003, je connais assez bien ce dossier et, depuis de nombreuses années, j'avais la conviction qu'il s'agissait d'une conspiration. Mais je parlais dans le désert et j'estimais la partie presque perdue. Tout a changé depuis quelques semaines".
et d'ajouter que :
"La thèse du vol par le Crédit Lyonnais n’a jamais été démontrée – et pour cause – et pourtant, pendant toutes ces années, M. Tapie a réussi à installer sa vérité dans l’opinion publique, chez certains politiques et journalistes, et même à certains moments parmi les responsables du CDR, la structure chargée de gérer le passif du Crédit Lyonnais."
Les divers acteurs sont tour à tour convoqués et confondus dans cette affaire qui est désormais qualifiée par la Justice d'"escroquerie en bande organisée".

Alors qu'il est question de mettre en examen Bernard Tapie, principal bénéficiaire de l'arbitrage, il semble que le rôle décisif d'un certain décideur politique n'ait pas encore fait l'objet d'un examen approfondie.

Toutefois, il ne faut pas préjuger de la suite de cette instruction qui avance désormais à grands pas. 

samedi 22 juin 2013

Nicolas B. joue et perd

Nicolas B. c'est Nicolas Bernard-Buss, militant anti-mariage homosexuel et cadre fondateur du mouvement des "Veilleurs". 


Il a été condamné, mercredi 19 juin, à quatre mois de prison dont deux avec sursis, pour rébellion et fourniture d'une identité imaginaire, et à une amende de 1 000 euros pour refus de prélèvement de son ADN et de ses empreintes.Il dort désormais à la prison de Fleury-Mérogis.

Il est bien sûr soutenu par la désormais classique clique d'élus et personnalités réactionnaires de service Charles Beigbeder, Béatrice Bourge, Christine Boutin, le Général Bruno Dary, Chantal Delsol,  Jean-François Legaret, Charles Millon ou encore Philippe de Villiers. 

Cette nébuleuse catholique-réactionnaire veut faire passer Nicolas Bernard-Buss pour un héros sacrifié injustement puni par la "Dictature Socialiste", le premier prisonnier politique, un grand délire de persécution politique dans lequel une certaine légitimité, leur légitimité serait supérieur à la légalité des lois.
 
Car, il ne faut pas se méprendre. Nicolas Bernard-Buss n'a pas été condamné par une autorité politique mais bien par un juge au sein d'un tribunal et dans le cadre des règles légales.

Il aurait pu être jugé dans une des deux chambres dédiées aux comparutions immédiates où la justice se pratique à grande vitesse, enchaînant les dossiers et les prévenus, où il n'est pas rare que les naufragés de la société se prennent en dix minutes chrono 6 mois ou 3 ans fermes, avec un avocat commis d'office qui a survolé le dossier en 5 minutes, sans expertise psychiatrique, ni même la présence des plaignants même pas convoqués pour l'occasion.
Non, il a été condamné par la 16e chambre, spécialisée dans les dossiers de stupéfiants et proxénétisme, qui venait d'être libérée suite à l'annulation procès de l'affaire Zahia. 

Si quelqu'un est bien responsable de l'incarcération de Nicolas B. c'est bien Nicolas B. : il était déjà passé en comparution immédiate, le 28 mai, à la suite d'une manifestation non autorisée sur les Champs-Élysées et avait alors été condamné à 200 euros d'amende avec sursis pour non-dispersion d'un rassemblement non autorisé, entrave à la circulation et aussi fourniture d'identité imaginaire, condamnation pour laquelle le Parquet a fait appel.
Et voilà, qu'il se pointe à peine 15 jours plus tard, avec la même morgue, le même sentiment d'impunité surfant sur la confusion entre légitimité et légalité.

Comme le subodore Gilles Devers sur son blog Actualités du droit :
Un jeune homme en prison, pour une courte peine, c’est une décision lourde, mais c’est du quotidien, et surtout, c’est l’application de la loi. Une fin de manif qui part en sucettes, des accrochages avec les flics et des attitudes d’insubordination face aux forces de l’ordre,… un vieux film, et ce n’est pas la première fois que ça se finit avec de la prison ferme. Ce qui est plus inhabituel, c’est le mandat de dépôt immédiat. Mais je subodore que l’attitude à l’audience n’a peut-être pas été au niveau de ce que doivent être les relations dans un Palais de Justice. Le tribunal, expérimenté, doit jauger la situation pour voir où le prévenu en est dans son rapport à la loi, et a priori les réponses ont été un peu décevantes… 
Le Justice est passée sans doute sévèrement mais bien moins que ce que prévoit la loi pour le seul chef d'accusation de rébellion :  1 an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende.

Nicolas B. n'est pas un héros, ni un prisonnier politique. Mais un militant contre la mariage pour tous pas très malin et un peu buté qui a confondu légitimité et légalité de ses actes.

vendredi 14 juin 2013

Chroniques de l'intolérance : l'Affiche censurée


Je ne vais pas m'étendre trop longtemps sur les circonstances de cette affiche pour le film "L'inconnu du Lac" du réalisateur Alain Giraudie.

Ce film qui se présente comme un "thriller gay" a obtenu le Prix de la mise en scène, Un Certain Regard au Festival de Cannes 2013.

Suite à des plaintes l'Affiche a été retirée dans les villes de Versailles et Saint-Cloud : cachons ce baiser que nous ne saurions voir !
Bien sûr, les responsables politiques de Versailles nient toute censure et renvoient à la régie publicitaire, JC Decaux qui elle affirme avoir agi sur demande des deux municipalités concernées.
Le mot censure est bien évité mais ce retrait est bien la conséquence de demandes répétées d'habitants de ces deux villes pour lesquels un simple échange de baiser entre deux hommes semble inacceptable.

Les réseaux sociaux sont vite entrées dans la discussion avec hélas un franc refus de l'homosexualité (ce n'est jamais de l'homophobie !).

L'imagination ou la perspicacité de pourfendeurs d'affiche va très loin avec cette fulgurance d'un commentateur qui dénonce l'immoralité d'un scène de fellation dûment affichée !
Est-ce une lente cécité visuelle qui m'atteint ou un reste de candeur juvénile mais j'ai mis beaucoup de temps à trouver la scène incriminée.

Vous aussi, saurez-vous la retrouver ?



Les Versaillais et les Clodoaldiens (habitants de Saint-Cloud) sont décidément bien habiles à traquer les comportements homosexuels. 
Encore une petite manif' pour tous pour le fun ?